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Lecornu 2, l'épée lige.

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Hier ou avant-hier, je ne sais plus trop, mais en tout cas avant que Sébastien Lecornu ne soit re-nommé premier ministre, j'avais commenté sur le sujet - et sur le ton de la rigolade - chez Nicolas et Falconhill. Chez le premier, qui proposait des scénarios sur le thème "qui va se retrouver à Matignon", je balançais l'idée saugrenue que Lecornu pourrait très bien être remis en selle. Je le disais en plaisantant à moitié et en taxant cette idée de possible cornichonnerie, histoire de ne pas avoir l'air complètement hors sol. Et chez Falconhill, je commentais sur notre fatigue républicaine mutuelle, et me disais que soit Macron mijotait une de ses surprises du chef, soit il était devenu complètement couillon. 

Et bam, Lecornu a été reconduit à Matignon. C'est, pour la majorité des gens, qu'ils soient politiciens, journalistes ou simples quidams, le choc et la sidération. Personnellement, je ne suis ni choquée, ni sidérée, et je vais vous expliquer pourquoi.

Quittons, si vous le voulez bien, le domaine de l'analyse logique et de la prédiction. Je vous emmène avec moi sur le plan du repérage des signaux faibles, et de l'observation toute scientifique des réactions d'un système institutionnel mis sous tension.

La première chose qui m'a fait tiquer est Lecornu lui-même, lorsqu'il s'est décrit comme un moine-soldat. Peu de gens se sont attardés à analyser cette métaphore pourtant, dans la bouche d'un ancien Ministre des Armées, elle est lourde de sens. Un moine soldat c'est un Templier, un Croisé, un Zélote, un Samourai. Il a juré sur sa foi de combattre, et rien ne le détournera de ce but. C'est l'homme lige médiéval, une personne entièrement dédiée à un seigneur, une foi ou une cause, qui a "juré son épée" en un serment qui ne saurait être rompu. En employant le terme moine-soldat, Lecornu aurait tout aussi bien pu nous dire "je suis le bras armé du Président". Indice numéro un.

Ensuite, Lecornu a déclaré: "j'ai terminé ma mission". Tout le monde y a vu une parenthèse qui se referme définitivement, alors que tout ce qu'il voulait dire était probablement: "j'ai terminé la mission qui constituait un ultime déminage afin de trouver un consensus, et maintenant je suis aux ordres, dans l'attente d'une nouvelle mission". S'il avait dit: "mon rôle est terminé", la signification aurait été bien différente...mais il a juste terminé une mission. Ce qui ne veut pas dire qu'on ne peut pas lui en confier d'autres. Indice numéro deux.

Plus troublant encore: celui qui a d'abord déclaré ne plus vouloir être premier ministre a subtilement modifié sa communication et nous dit à présent: "je ne cours pas après le job". Traduction, je ne l'exclus plus. Indice numéro trois.

Je crois que ce gars-là sait très bien ce qu'il fait, et joue à la note près la partition écrite pour lui. J'attends bien sûr de voir le temps que çà prendra pour former un gouvernement, la déclaration de politique générale, et si un projet de budget sera présenté dans les temps, à savoir ce lundi.

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Je n'ai pas le moindre doute que ce gouvernement risque d'être censuré rapidement. Et c'est là que je repense à cette théorie farfelue de gouvernement zombie qui avait attiré mon attention il y a quelques jours. Je vous invite à relire ce billet avant de continuer avec la suite de mes élucubrations. Il suffirait que le gouvernement tombe, que Lecornu re-démissionne, et qu'il soit re-re-nommé premier ministre, et voici notre gouvernement zombie en affaires courantes, qui ne peut plus être à nouveau censuré. La menace de censure que certains brandissaient est devenue aussi efficace qu'un pistolet à bouchon. Je me souviens d'une anecdote lue hier avant la réunion à l'Elysée des présidents de parti et de groupe, dans le but probable de chercher un consensus entre les factions opposées à la dissolution. Les noms m'échappent, mais un participant disait à l'autre avant la réunion: "mais qu'est-ce qu'il nous veut", en parlant vraisemblablement du Président. Et son interlocuteur de répondre, renfrogné: "il va nous baiser". Petite musique prémonitoire.

Mais pourquoi, si ce scénario était inéluctable, ne pas avoir directement laissé Lecornu démissionnaire à la tête de son équipe sortante il y a quelques jours au lieu de générer un tel psychodrame. Je n'en sais rien, mais la maxime diviser pour régner s'applique, et certains maillons faibles on sauté, comme Retailleau qui s'est auto-éjecté de l'équation gouvernementale en prenant des postures de diva intransigeante. LR sont au bord de l'implosion, tiraillés entre Waucquiez et Retailleau. Certains masques sont également tombés, comme ceux d'Edouard Philippe et Gabriel Attal, fort pressés d'élaborer un peu hâtivement des scénarios parricides à la Brutus. Et la peur de la dissolution, lame tout à fait prête à sortir du fourreau, terrorise probablement bon nombre de députés, particulièrement au Centre qui se ferait absolument laminer en cas de législatives. Tout ce petit monde va peut-être continuer à comploter en sourdine, mais va peut être, et même probablement, se soumettre.

Tiens, Gabriel Attal. Je ne lui ai pas encore taillé de costard, à celui-là. Sa dernière déclaration en date est qu'il faut savoir partager le pouvoir. Pauvre garçon! Jacques Chirac le disait en 1995, le pouvoir ne se partage pas. Il s'exerce, et s'il se disperse il se dilue. Monsieur Attal représente un courant de pensée qui me crispe, et qui estime qu'il faut s'en aller à la première tempête, et que s'accrocher au pouvoir est une tare et un manque d'humilité. Cette mentalité est bien digne de notre siècle, où on préfère la facilité à la résilience, et où on voit en cette dernière un entêtement, une tare, une faute. Eh bien non. Quand une tempête s'annonce, le capitaine reste à la barre et fait face, quels que soient les coups qu'il se prend dans la tronche. Et si on a fait des conneries en donnant le cap, on reste pour essayer d'y trouver des solutions, on ne cavale pas comme un pleutre hors de la ligne de feu. Non, mon pauvre Gabriel, nous n'avons visiblement pas la même vision de la responsabilité et de l'exercice du pouvoir, tu n'as aucune verticalité en toi. Tu vois dans la reculade une vertu souhaitable...mais c'est, comme le disait Nietzche, une vertu qui rend petit.

Je me suis écartée de l'analyse de la situation présente en y préférant une observation des signaux faibles qui rendaient un scénario Lecornu 2 plausible. Le présent reste évidemment fort confus. Les tenants et aboutissants de cette crise politique ne sont pas clairs, et je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve. Un mieux, une stabilisation, une dégringolade? Il n'y a pas grand chose à faire à part observer et attendre. Pour ma part je m'installe pour observer en sociologue de comptoir les réactions outrées qui ne manqueront pas de se faire entendre. Hululements d'hostilité sur X, vociférations mélenchonistes et lepénistes, chute dans les sondages de popularité. Choc et sidération face à un retournement de situation que beaucoup ne croyaient pas possible. Je vais donc vous laisser pour le moment, je m'installe pour suivre la situation avec grand intérêt.

Oh, juste un dernier mot. Tout ce que je viens de vous dire n'est peut-être qu'une sur-analyse qui n'a guère plus de valeur que du pipi de chat. Peut-être que je me trompe lourdement, et vois dès modèles stratégiques là où il n'y a que chaos et incompétence. La manoeuvre Lecornu 2 est-elle un jeu d'échecs ou les derniers soubresauts d'un exécutif à l'agonie? Je ne sais pas. L'avenir nous le dira.

Vous me direz allez Juliette, arrête de te tortiller en prenant des airs mystérieux, tu kiffes cette nomination ou pas? Ben oui, je lui trouve un certain charme. Oui, je sais, cette remarque me vaudra des grincements de dents et des oeillades courroucées. Peu importe, çà va très bien se passer, tenir le fort sur des opinions impopulaires, c'est une spécialité de la maison. Bisous quand même!

 

A la revoyure,

Juliette Evola.

 

Commentaires

  • Comme toi, comme les autres, nous sommes tous très inquiets de la manière dont va évoluer la situation. Souhaitons bonne chance à Sébastien Lecornu et espérons qu'il réussisse.

  • J'espère en effet qu'il réussira. On ne me trouvera pas dans les rangs de ceux qui se délectent par avance de la possibilité qu'il puisse échouer. Ce serait indigne.

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