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gouvernement

  • Les six pistoleros LR.

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    Or donc, le nouveau gouvernement Lecornu est sur pied. Profils techniques, jeunes visages, avec un poil de recyclage quand même...çà peut marcher. Je crois que demain, lors de sa déclaration de politique générale, Lecornu mettra provisoirement la réforme des retraites au frigo, afin d'éviter le vent des boulets que le PS menace de tirer s'il ne le fait pas. On sait déjà que LFI et le RN vont canonner à pleine bordée. Aux grincheux qui affirmeront que lâcher sur la réforme des retraites c'est jeter à la poubelle une mesure phare de Macron, je répondrai que pour l'instant, les priorités sont de déposer un budget et de retrouver un peu de stabilité institutionnelle. Tout bien réfléchi, rediscuter sérieusement de ce truc torché à la va-vite n'est sans doute pas une mauvaise idée. A l'heure où le navire France prend l'eau par tous ses sabords, la priorité c'est d'arrêter les voies d'eau, pas de se préoccuper du menu de la cantine. Un peu d'agilité intellectuelle et d'adaptation en situation de crise, s'il vous plaît!

    Mais le sujet que je veux développer aujourd'hui est l'entrée au gouvernement de six ministres LR, brisant allègrement la discipline de leur parti et les consignes de Bruno Retailleau qui étaient de ne pas participer au gouvernement Lecornu 2. Eh bien, pas de railleries ni de phrases cinglantes de ma part ce coup-ci. Vous me direz mais enfin, c'est une trahison, une rupture de la discipline du parti, ces opportunistes ont vendu leur âme pour une assiette de soupe et un plat de lentilles! Honteux!

    Seulement voilà, l'auberge macroniste vers laquelle ils se dirigent, c'est pas La Tour d'Argent ou Le Pied de Cochon. Les murs sont fissurés et question réputation, le taulier a perdu ses étoiles Michelin vis-à-vis de l'opinion depuis un bon moment déjà. Quel serait l'intérêt de s'embarquer dans cette galère? J'ose espérer que ces six ministres ont agi selon leur conscience dans l'intérêt de la Nation, en mettant leurs doutes, critiques et rancoeurs éventuelles en veilleuse. Parce qu'ils pensent qu'ils seront plus utiles au sein du gouvernement qu'en dehors, même si leur parti lui a promis de soutenir ce dernier. Acteurs agissants plutôt que béquilles passives. Les cyniques qui voient toujours le verre à moitié vide et des intentions égoïstes partout me diront que je suis bien naïve. Peut-être, mais je persiste à croire que la démarche de ces pistoleros dissidents est basée sur une volonté d'agir pour le bien commun.

    Si Bruno Retailleau veut montrer qu'il est maître chez lui, il ne pouvait pas faire autrement que d'exclure ces six personnes de son parti, sans quoi il aurait donné l'image d'un chef faible, qui ne respecte pas ses propres consignes. Rien à dire là-dessus, il n'avait guère le choix.

    Ce que j'aurais fait à la place de cette "bande des six"? Obéir aux consignes du parti ou à ma propre boussole interne? Je m'en tiens à mon propre conseil pour ce qui est d'agir de la manière que j'estime juste. Je ne serai jamais à l'aise dans la structure d'un parti ni avec le fait de m'aligner avec la ligne de ce dernier si cela veut dire ne pas être alignée avec ma propre conscience. Et qu'en est-il des valeurs idéologiques fondamentales, me direz-vous? C'est très simple, et je vais citer le général Clausewitz: nul plan de bataille ne résiste à l'exposition avec le réel. En situation de crise, il faut savoir s'adapter et regrouper ses ressources pour faire face à la situation le mieux possible.

    Oui, je serais entrée dans ce gouvernement. Pas pour le frisson illusoire du pouvoir ou les avantages en nature, mais bien parce que je pense que, si j'ai les compétences nécessaires, il est préférable d'agir du dedans plutôt que de se contenter de rester à l'extérieur de l'arène. Je ne dis pas que cette dernière position n'est pas un choix valide, je dis simplement que ce n'est pas le mien.

    Et, pour conclure, une dernière citation, de Charles Darwin cette fois: lors de l'évolution, ce ne sont ni les plus forts, ni les plus intelligents qui survivent. Ce sont ceux qui s'adaptent. A méditer!

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola

  • Pensées crépusculaires.

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    Vivons-nous une crise politique, voire même une crise de régime? Peut-être. Et peut-être que c'est bien pire. Je me dois de jouer les Cassandre, mais du corps de notre démocratie s'élève une odeur bien reconnaissable: celle de la gangrène, celle d'une décomposition voilée mais tangible. La classe politique n'est plus un orchestre qui joue parfois des notes discordantes, c'est un ramassis d'individus incapables de jouer autre chose que leur propre partition, sans se soucier des voisins. On s'exclut mutuellement, on rejette la moindre concession, l'intérêt particulier et la psycho-rigidité politique remplacent le bien commun.

    Du haut de leurs quelques misérables pourcents aux dernières législatives, des roitelets s'agitent, s'imaginant faiseurs de rois. Ils exigent leurs trophées, rêvent d'une bonne assiette de soupe malgré leurs gesticulations outrées. Ils agitent leurs conditions comme autant de tabous non négociables. Ce n'est qu'un bal de petites gens frustrés et ambitieux, l'oeil braqué sur la présidentielle de 2027. 

    Certains, par clientélisme mortifère, s'associent à ce que nos sociétés ont produit de pire au siècle dernier: l'antisémitisme, la théocratie, la haine de l'opposant politique. Et une partie de la vielle Gauche, la vraie, celle qui est respectable, chipote en hésitant à demander un divorce net avec ceux qui agissent de la sorte. Ne se rendent-ils pas compte qu'il s'agit d'un repoussoir absolu pour certains? Pour ma part je n'oublierai pas le spectacle lamentable du président d'un parti démocratique appelant à hisser le drapeau palestinien au fronton de nos mairies.

    Puis il y a ceux qui tremblent devant la menace de l'extrême-drouââte. Je suppose qu'ils ne se rendent pas compte que c'est leur manque de colonne vertébrale et leurs compromissions qui ont poussé bon nombre d'électeurs à émettre un vote coup de poing, un vote de sanction, un vote de refus. Les partis traditionnels feraient bien de faire leur examen de conscience et de se regarder dans la glace: peut-être arriveraient-ils à la conclusion que ce sont leurs propres indigences qui sont à l'origine de cette situation

    Ensuite viennent les tenants de la pensée iPhone. Mais oui, vous savez bien, ceux qui se ruent sur l'achat d'un nouveau modèle dès que le précédent ne leur plaît plus trop. Je fais référence, bien sûr, aux zozos qui appellent à la démission du Président. Il faut avoir bien peu de recul pour imaginer que si Macron partait, du jour au lendemain tout irait mieux. Ah bon? Il y a un rayon chez IKEA qui propose un homme providentiel en kit qui va tout résoudre d'un claquement de doigts? C'est risible. Que Monsieur Toulmonde pense ainsi par colère et ras-le-bol, c'est une chose. Mais que des politiques chevronnés comme ce dépendeur d'andouilles d'Edouard Philippe tiennent le même discours...je lève les yeux au ciel. Ces gens-là veulent tuer le père, phénomène courant en politique, mais ils ne proposent aucune solution alternative. 

    N'oublions pas les doctes paroles de ceux qui disent qu'un paysage politique fracturé en trois blocs ne peut conduire à aucune majorité viable. Tous nos voisins arrivent à former des gouvernements de coalition, mais pas nous, dieu nous en préserve (rictus sarcastique). Et après on va pleurer quand on se fait traiter de Gaulois réfractaires. Mais je me marre! C'est pas réfractaire au changement et au compromis qu'il faut dire: on est carrément dans des schémas psychorigides aux conséquences délétères.

    Car pendant ce temps, la situation économique s'aggrave, et je ne parle même pas de l'image de la France à l'étranger. Les agences de notation et les instances européennes aussi nous surveillent: un pays incapable de se stabiliser politiquement et économiquement va, plus tôt que tard, s'attirer leur foudres. Et les marchés financiers observent, calculent, et un beau jour ils sanctionnent, n'ayez aucun doute là-dessus.

    Nouvelle marotte: suspendre la réforme des retraites pour lâcher un demi-susucre à la Gauche. La belle affaire. Nous sommes dans un pays où plus de gens meurent qu'ils ne naissent, une pyramide démographique vieillissante. Refuser de prendre en compte ce vieillissement de la population et la nécessité, certes douloureuses, de toucher à la vache sacrée de l'âge de la pension, c'est une fuite en avant budgétaire.

    Une nouvelle dissolution? Elle ne changerait pas grand chose au fractionnement de l'échiquier politique, même si le Centre s'effondre (ce qu'il fera) et que le RN progresse (ce qu'il fera aussi). 

    Le mal institutionnel français n'est pas uniquement celui de Macron (qui n'est pas pour autant blanc bleu dans l'affaire), c'est celui d'une génération de politiques incapables de négocier, de former une coalition, de faire un programme et de gouverner. Et oui, cette immaturité politique et démocratique cause des foyers de gangrène. Le moment n'est pas bien loin où beaucoup de gens, épuisés et dégoûtés de leur classe politique, rêveront en secret d'un dirigeant au geste fort, tranchant et brutal. Vous verrez.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola.

  • Zut à la fin!

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    Voilà une matinée qui tourne au vinaigre: non seulement le gouvernement Lecornu a implosé en vol quelques heures après sa formation, mais mon confrère Nicolas se met en grève, car les évènements se succèdent de façon tellement rapide que les billets qu'il écrit deviennent obsolètes avant même d'être publiés. C'est mon cas aussi. Hier j'avais veillé assez tard pour écrire ce que je pensais du nouveau gouvernement dans un billet à publier ce matin après relecture, mais pouf, tout part en sucette. 

    Je décide donc de débrayer à mon tour et de prendre quelques distances avec l'écriture de billets politiques. Il est peut être enfin temps que je vous parle des derniers livres que j'ai lu, ou de mon amour pour le Science-Fiction, l'Heroic Fantasy et les jeux de rôles.

    Je ne sais pas combien de temps cette résolution tiendra. Peut être pas plus longtemps que le gouvernement Lecornu. Une des principales raisons pour lesquelles je n'ai pas envie d'élaborer sur la situation est que le ralbol provoqué par le spectacle piteux de notre classe politique additionné à une désillusion sarcastique croissante me ferait probablement dire des choses qui dépassent ma pensée et flirtent avec un certain populisme. Je ne suis pas immunisée contre ce phénomène, et même si mes barrières éthiques montent une garde vigilante, il y a des moments où le Côté Obscur de la Force me chatouille un peu le cerveau.

    Bien. Il ne reste plus à Macron que de nommer son chien Nemo premier ministre. Dans la Rome antique, un cheval avait bien été nommé consul. Bon, voilà que je recommence...tais-toi Juliette, et va boire une tisane.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola.

  • Lecornu à la sauce belge et gouvernement zombie.

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    Il ne faut pas être sondeur ou politologue pour se rendre compte qu'un léger (?) vent d'irritation souffle sur l'opinion française quant à un gouvernement qui n'a toujours pas montré le bout de son nez, presque un mois après l'accession d'Emmanuel Macron...euhh je veux dire de Sébastien Lecornu à Matignon. Pour l'expat vivant à Bruxelles que je suis, force est de constater que le karma semble prendre sa revanche sur les blagues sur les frites et l'accent belge dont certains Français sont friands: la France est bel et bien embourbée dans un scénario à la Belge: une fracture de l'échiquier politique en blocs qui peinent à trouver un consensus afin de former une majorité ou, au minimum, d'éviter la censure.

    Les concertations menées par Lecornu sont elles aussi très "belges": le premier ministre consulte d'abord toutes les parties en présence en vue de former un gouvernement, et le cap ne sera donné qu'ensuite. Cette méthode inhabituelle agace en France, où nous ne sommes pas habitués à un tel flou artistique. Lecornu a jeté quelques miettes de ci, de là, mais le plat de résistance tarde à être servi. Sa dernière déclaration est qu'il renoncera à l'emploi du 49.3 pour faire passer la pilule en cas de blocage...mouais. Pour une fois, je suis d'accord avec la Méluche, qui estime que c'est des salades. Comme qui dirait, les promesses n'engagent que ceux qui y croient.

    Je ne vais pas détailler l'exercice de grand écart auquel Lecornu se livre, ni ses perspectives de réussite, et encore moins les probabilités très élevées de censure qui va lui tomber dessus comme la vérole sur le bas clergé en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Mais j'aimerais vous parler d'un article lu récemment dans la section abonnés du Figaro, et qui a attiré mon attention sur une bizarrerie constitutionnelle.

    Je n'ai pas l'habitude de publier des résumés d'articles de presse mais, cet article étant réservé aux abonnés, je vais pour une fois déroger à cette règle, puis vous faire mes commentaires. Je tiens à préciser qu'il s'agit ici d'un petit jeu intellectuel qui reste du domaine de la théorie, je ne prétends pas que les faits exposés constituent une solution viable au blocage institutionnel actuel. Allons-y, retournons nous le cerveau. Les données issues de l'article sont en italique, et mes commentaires sont en texte normal.

    Voyez-vous, la Constitution ne fixe aucun délai pour ce qui est de la formation d'un gouvernement. Le gouvernement démissionnaire actuel pourrait-il donc théoriquement être maintenu jusqu'aux présidentielles de 2027? Vous me direz immédiatement qu'il y a un hic, et que les textes budgétaires doivent être présentés au Parlement pour la mi-octobre. Et pour ce faire, il faut un gouvernement de plein exercice, non?

    Pas exactement, et il y a une astuce: au nom de la continuité de l'Etat, la Constitution prévoit qu'un "budget d'urgence" puisse être mis sur pied par ordonnance, et ce que le gouvernement soit démissionnaire ou non.

    Comment çà marche? L'adoption d'un budget dépend non seulement de la Constitution mais aussi de la LOLF (Loi Organique relative aux lois de Finance), qui est une sorte de "Constitution financière" qui encadre le budget de l'Etat.

    L'Article 39 de la Constitution et l'Article 38 de la LOLF exigent que le projet de loi des finances soit proposé à l'Assemblée Nationale à la mi-octobre. Celle-ci a alors 40 jours pour adopter le texte en première lecture, s'il n'y a pas d'adoption  le gouvernement saisit le Sénat qui a 15 jours pour statuer. Et le Parlement a 70 jours au total pour adopter le budget complet.

    En cas de dépôt tardif du projet de loi des finances, l'Article 47.3 de la Constitution entre en jeu et un dispositif d'urgence est prévu: les dispositions de ce projet de loi peuvent être activées par ordonnance. Le gouvernement, qu'il soit démissionnaire ou en exercice, va demander au Parlement d'ouvrir par décrets les crédits provisoires nécessaires à la continuité du fonctionnement des services publics en attendant qu'un budget soit finalisé.

    On voit donc qu'un "budget d'urgence" peut être adopté par un gouvernement démissionnaire. Mais un tel gouvernement peut-il être censuré? Non, un gouvernement déjà démissionnaire ne peut pas être à nouveau renversé par les députés: on ne peut pas tuer ce qui est déjà mort. C'est, en quelque sorte, un gouvernement zombie. Et une motion de censure vise le gouvernement en tant qu'organe, et non le premier ministre. Et même renversé, ce dernier pourrait être immédiatement remis en place par le Président. Et cette fois, il y a un précédent: en 1962, Pompidou avait été immédiatement re-nommé premier ministre par de Gaulle après avoir été censuré.

    Nous voyons donc qu'il y a des failles constitutionnelles qui permettraient en théorie de maintenir indéfiniment Sébastien Lecornu et un gouvernement démissionnaire en affaires courantes jusqu'à la prochaine élection présidentielle. Cela rendrait "irrenversable" le premier ministre et son équipe sortante.

    Ceci étant, est-ce parce que c'est possible que c'est souhaitable? Un gouvernement éternellement en affaires courantes ne pourrait pas faire de réformes de fond ni poser aucun acte qui engagerait durablement un gouvernement futur. Et pour ce qui est de sa légitimité politique, ce ne serait franchement pas terrible. Mais, et je vais me faire l'avocat du diable, serait-ce vraiment pire qu'un blocage total à long terme ou un boulevard ouvert au RN par une éventuelle dissolution? Je ne me prononcerai pas là dessus.

    Je conclurai en disant que parler de cette option zombie n'était qu'un exercice intellectuel qui m'a permis d'aller trifouiller dans la Constitution (j'aime bien çà), et pas nécessairement quelque chose que je considère comme un scénario qui pourrait se concrétiser.

    Quoique...bien sûr la Belgique n'est pas la France, mais les Belges jouent régulièrement à ce genre de jeu depuis bien des années

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola