
Ce 22 septembre, le Président Macron et quelques autres gugusses canadiens, belges, luxembourgeois, portugais, australiens et britanniques monteront à la tribune de l'ONU afin de reconnaître un Etat palestinien. Cet acte symbolique, qui ne changera rien sur le terrain, me met dans une colère noire. Je m'étais jurée de ne pas aborder ce conflit dans ce blog, car je ne suis pas capable de le faire de manière rationnelle. J'ai en effet perdu une amie dans ce conflit, le sang a coulé, et plus jamais je ne pourrai être objective.
Reste donc la colère. Un psychologue clinicien m'a dit un jour que le fait de la matérialiser sous forme écrite aidait à évacuer l'adrénaline et à revenir à un mode de pensée plus apaisé et rationnel. L'écriture étant ma forme privilégiée d'expression (d'où ce blog), il est devenu évident que j'allais user de ce moyen pour vider le gros abcès que j'ai dans l'estomac.
Ce n'est pas la première fois que j'écris à un élu lorsqu'une décision entre en conflit avec mes valeurs racines. Et peu importe que le destinataire de la lettre ne la lira pas et qu'elle se perdra dans les dossiers de ses équipes de communication. Le geste est profondément libérateur, et c'est là mon but: me libérer d'une colère qui me ronge.
Ecrire cette lettre fut un véritable travail sur moi-même. Le premier jet était un bouillon de rage brute, émaillé de noms d'oiseaux fort peu aimables. Il a fallu cinq jours pour en faire une missive civilisée. Je vous livre donc ici la lettre que je viens d'envoyer par voie électronique à la Présidence de la République. Avec mon vrai nom, toutes mes coordonnées, tout le bazar. Peu me chaut que Macron la lise jamais, mais c'est un acte cathartique qui m'a fait le plus grand bien.
Des modèles de lettres adressées aux autorités, au Président, ou encore pour rédiger des Procédures Opérationnelles Standard conformes à votre domaine professionnel d'activité, peuvent être trouvés sur des sites comme [SCRIBD]. Je me suis basée sur un de ces modèles pour écrire la lettre qui suit.
A la revoyure,
Juliette Evola.
La lettre:
Monsieur le Président de la République,
Je me permets, en tant que citoyenne française, d’exercer mon droit démocratique de vous adresser mes préoccupations concernant la reconnaissance par la France d’un État palestinien, annoncée pour le 22 septembre lors de l'Assemblée Générale des Nations Unies à New York.
Je tiens à exprimer mon inquiétude et mon profond désaccord quant à une telle décision, prise sans conditions préalables indispensables, telles que le démantèlement du Hamas ou la libération des otages israéliens. La proximité de cette annonce avec le souvenir encore brûlant du massacre du 7 octobre 2023 me semble particulièrement malheureuse et de nature à envoyer un message de faiblesse face au terrorisme.
Vous n’ignorez pas, Monsieur le Président, que si l’on peut critiquer certains aspects de la riposte israélienne à Gaza, Israël reste néanmoins la seule démocratie parlementaire de la région. Depuis les accords d’Oslo, cet État a proposé à maintes reprises des accords en vue d’une solution à deux États, mais toutes ces initiatives ont été rejetées par les représentants palestiniens. Il est donc très regrettable que des factions terroristes puissent aujourd’hui interpréter la reconnaissance d’un État palestinien à l’ONU comme une victoire, renforçant leur position au détriment de la paix véritable.
Je suis bien consciente que, simple citoyenne, je n’ai pas accès à toutes les données du jeu diplomatique. J’ose espérer que cette décision s’inscrit dans une stratégie qui, à terme, servira les intérêts de la France et contribuera réellement à la stabilité au Proche-Orient. Mais je redoute qu’elle ne traduise plutôt une certaine naïveté de l’Occident face à la mentalité des extrémistes palestiniens.
Mon grand-père a combattu dans les rangs de la Légion étrangère contre le nazisme. Il est devenu Français par le sang versé. C’est au nom de cet héritage, et de la mémoire de ceux qui se sont battus pour défendre nos valeurs, que je me sens tenue de vous faire part de ma révolte devant ce qui m’apparaît comme une concession faite aux ennemis de la démocratie.
Avec tout le respect dû à votre fonction, je vous prie de considérer la voix d’une citoyenne profondément attachée à la sécurité de la France, à la vérité historique, et à l’exigence de fermeté face à ceux qui refusent la paix.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma haute considération.
Commentaires
Je pourrais cosigner ta lettre !
Une remarque par rapport à ton texte d'introduction et cette phrase : "Je m'étais jurée de ne pas aborder ce conflit dans ce blog, car je ne suis pas capable de le faire de manière rationnelle."
Au début, j'essayais de n'aborder ce conflit que sous l'angle de la politique intérieure française et donc, concrètement, de la récupération par LFI. Je ne sais pas si je suis rationnel (ma seule proximité avec Israël est celle que j'ai avec des collègues et des voisins qui ont de la famille là-bas) mais je crois que personne ne peut l'être et, surtout, je ne connais pas grande chose. Cela étant, si c'est difficile d'être rationnel c'est parce qu'il y a un peuple qui en prend plein la gueule. On peut difficilement le soutenir sans prendre parti pour des terroristes et on ne peut pas ne pas le soutenir.
En outre, la solution à double Etat est nulle, en partie à cause de ce que tu dis dans la lettre mais aussi parce qu'il est évident qu'elle ne pourra jamais rien résoudre.
Je crois hélàs que le conflit israélo-palestinien est un de ces problèmes qui n'est pas près de se résoudre. Trop de douleur et de haine ont été semés de chaque côté. Ceci étant, je suis bien heureuse de vivre en démocratie et de pouvoir écrire ce genre de lettre à un dirigeant sans craindre de me faire zigouiller. Cette démarche ne résoudra rien, mais elle a eu le mérite de me faire symboliquement vider mon sac au lieu de ruminer de sombres pensées dans un coin.
Je partage votre position. Macron se fourvoie complètement...
Je me demande ce qu'il espère tirer de cette annonce. Mystère et boule de gomme, mais c'est une gifle aux victimes du Hamas.
J'avais zappé ton billet. Une lettre que je cosignerai volontiers.
Après je partage le sentiment de Nicolas : on ne peut pas avoir une raisonnement rationnel. Car ça touche notre coeur, notre histoire.
La récupération abjecte de LFI, la haine du juif, l'oubli de l'origine de la situation (le massacre du 7/10), forcément ça biaise notre jugement.
Mais nous sommes humains.
48 Français (binationaux) tués par le Hamas le 7 octobre, quand même. Je n'ai plus rien à dire sur ce sujet, sinon je vais me remettre en pétard.