Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Donjons, dragons, prison.

prison.jpg

Or donc, c'est fait: ce soir, Nicolas Sarkozy dormira en prison. 

J'avais écrit un billet quand il a pris cinq ans assortis d'exécution provisoire, et j'avais abondamment commenté cette décision de justice sur divers blogs. Oui, je crois que quand on traîne toute une batterie de casseroles, il y a un moment où on finit par payer l'addition. Les magouilles c'est comme la Lune dans le ciel, parfois elle est cachée mais elle finit toujours par se voir. Non, je ne crois toujours pas au "complot des juges rouges". Et le proverbe disait vrai: le pouvoir corrompt, et le pouvoir suprême est un risque encore plus grand de corruption. Le jour de l'incarcération de Sarkozy devrait donc me laisser relativement indifférente vu que les choses étaient programmées depuis un moment.

Pourquoi alors suis-je d'humeur aussi massacrante?

Bien sûr, aujourd'hui n'est pas un jour de gloire pour ce qui est de l'image donnée par notre classe politique: un ancien chef de l'Etat derrière les barreaux comme le dirigeant déchu d'une vulgaire république bananière, il n'y a pas de quoi se réjouir. Mais je me rends compte que mon malaise est plus insidieux encore.

J'ai été sarkozyste en 2007. Je ne l'étais plus en 2012. Petit à petit et au cours des années, j'ai adopté une démarche très circonspecte vis-à-vis des hommes politiques et des idéologies. Je préfère l'examen réfléchi des actions sur le terrain aux postures de partisans rangés derrière le chef avec le doigt sur la couture du pantalon. Je n'aime plus trop les adjectifs et qualificatifs en -iste et -isme, qui me paraissent assez réducteurs, bien que j'en use parfois comme facilité de langage.

Sarkozy, donc. Au delà de ses idées, réalisations, revirements ou foirages, il a toujours eu une personnalité que les gens adoraient ou détestaient, mais qui laissait rarement indifférent. Il y a un côté émotif oriental chez lui, et une propension marquée à la transgression et à la disruption. Il porte en lui un peu de ce que les rôlistes de l'univers Donjons et Dragons identifient comme l'Etoile du Chaos. Dans cet univers, le Chaos n'est pas nécessairement destruction et bordel désorganisé, il peut également être promesse de renouveau et dépassement des anciennes croyances. C'est une arme à double tranchant, puissante mais souvent dangereuse.

ChatGPT Image 21 oct. 2025, 12_13_09.png

Et c'est ici que ce billet cesse d'être politique pour entrer à pieds joints dans la sociologie de comptoir assaisonné de culture geek. Dans la vie réelle, je repère les individus dont la pensée est en alignement chaotique de façon immédiate et viscérale. La résonance est aussi naturelle que celle de l'aiguille d'une boussole qui s'aligne sur le Nord magnétique. Oh rassurez-vous, rien de pathologique n'en découle. Il n'y a pas de tueurs en série, de bandits de grand chemin comme Bonnie et Clyde, ou de révolutionnaires aux mains sanglantes dans mon petit Panthéon personnel (et Panthéon est un grand mot). Je ne crée pas de liens affectifs malsains avec de mauvaises fréquentations, ne souffre d'aucune assuétude (à part de discuter politique) et n'ai jamais eu de problèmes avec la justice. D'ailleurs, je recherche souvent parmi mes connaissances des gens stables et cartésiens qui contrebalanceront mes propres fulgurances, mon propre chaos. 

Est-il donc vraiment surprenant qu'une personnalité comme Sarkozy ait attiré mon attention, par delà même de son positionnement politique? Bien sûr que non. Est-ce une des raisons pour les quelles sa chute m'agace? Y a-t-il encore un peu de sa personnalité chaotique qui ne me laisse pas indifférente? Il y a probablement de çà. Fin du capillotractage sociologique.

De plus, il y a un peu de mon ancien moi que j'enterre en tournant pour de bon la page Sarkozy. L'époque où j'étais une idéaliste incapable de compromis, carrée, tranchante, d'une maturité politique à peine adolescente malgré mon âge adulte. Je relis parfois certains vieux billets de mon ancien blog de 2007...ah que j'étais naïve alors! Les portes de la prison de la Santé se referment avec un clic définitif sur ma naïveté d'antan. Je dois bien admettre que j'en suis parfois nostalgique. C'est sans doute la raison principale pour laquelle je suis de mauvais poil aujourd'hui.

Cela veut-il dire que j'aurais gardé quelque part un petit peu d'affect pour cette vieille canaille de Sarko? Peut-être bien! Ce n'est pas rationnel, mais je suppose que c'est humain.

 

A la revoyure,

Juliette Evola.

Écrire un commentaire

Optionnel