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Politique et sociologie

  • Ukraine: le plan de paix de la honte.

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    Il y a quelques jours, le faiseur de paix auto-proclamé de Washington, sa très instable Majesté Donald 1er, a proposé un plan de paix en 28 points pour mettre fin au conflit en Ukraine. On voit que le Black Friday approche et que c'est les soldes: tout est bradé, tout doit partir! Petit florilège:

    2. Un accord global de non-agression sera conclu entre la Russie, l'Ukraine et l'Europe. Toutes les ambiguïtés laissées en suspens ces 30 dernières années seront considérées comme réglées. Ben voyons, c'est comme aller à confesse, on efface l'ardoise et on met toutes les choses dérangeantes sous le tapis. Bon plan pour la Russie qui verrait ainsi la fin des ambigüités territoriales au Donbass, et dans les zones de Donetzk et Louhansk, arrachées à l'envahisseur au prix du sang.

    3. Il est attendu que la Russie n'envahisse pas les pays voisins et que l'Otan ne s'étende pas davantage. Désopilant. De Pierre le Grand de Russie à Catherine II en passant par le peintre autrichien moustachu, bien des autocrates ont signé des pactes de non-agression. Avec les résultats que l'on sait.

    6. Les forces armées ukrainiennes seront limitées à 600 000 militaires. Ah, voilà. C'est à l'agressé qu'on demande de démilitariser, pas à l'agresseur. Fantastique!

    7. L'Ukraine accepte d'inscrire dans sa constitution qu'elle ne rejoindra pas l'Otan, et l'Otan accepte d'inclure dans ses statuts une disposition spécifiant que l'Ukraine ne sera pas intégrée à l'avenir. C'est tellement énorme que c'en est une insulte à l'intelligence. Cette clause retire techniquement à l'Ukraine le droit d'avoir des alliés qui pourraient la défendre en cas d'agression. Et cela doit être gravé dans la Constitution. On a un baril de vaseline en prime avec çà, j'espère?

    13. La Russie sera réintégrée dans l'économie mondiale, avec des discussions prévues sur la levée des sanctions, la réintégration du G8 et la conclusion d'un accord de coopération économique à long terme avec les États-Unis. Nous y voilà: on récompense l'agresseur impérialiste en lui offrant une nouvelle virginité. Répugnant.

    26. Toutes les parties impliquées dans ce conflit bénéficieront d'une amnistie totale pour leurs actions pendant la guerre et s'engageront à ne faire aucune réclamation ni n'envisager aucune plainte à l'avenir. Sans nul doute ma préférée pour ce qui est de l'ignominie! Pas possible autrement, c'est Poutine lui-même qui a pondu cette ligne. Amnistie pour les crimes de guerre, les tortures de prisonniers et même de civils, les viols comme arme de guerre. On croit rêver, ou plutôt cauchemarder.

    Je pourrais continuer longtemps car tout est du même acabit, mais j'ai envie de vomir.

    Cette proposition n'est pas un accord de paix, c'est un acte de capitulation en bonne et due forme. Avec un "allié" comme Trump, nul besoin d'ennemis - s'il vous arrive malheur, il y a de bonnes chances qu'il ne vous défendra pas. Cela fait un moment que Trump cire les pompes de Poutine, mais à ce stade ce n'est plus du cire-godasses, c'est du lustrage de poireau.

    Nous voici revenus à l'esprit de Yalta après la Seconde Guerre Mondiale: les grandes puissances s'arrangent entre elles sur le dos de l'Europe, qui n'a qu'un petit strapontin pour assister au dépeçage géopolitique. Et hélàs, même si Macron, Starmer, Merz et von der Leyen ont immédiatement réagi en vue d'essayer de peser dans la balance pour apporter des amendements à cet accord indigne...le poids diplomatique de notre Vieux Continent pèse bien peu face aux petits arrangements entre amis entre l'autocrate du Kremlin et le bouillonnant Agent Orange de la Maison Blanche. Car voyez-vous, ils partagent la même vision du monde: l'usage de la force décomplexé. 

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    A l'heure où des drones absolument pas russes, Poutine le jure, testent les frontières aériennes des pays baltes, de la Pologne, ou de la Belgique, il est grand temps pour nous Européens de changer de mentalité. La Paix dont nous nous étions accommodés depuis des générations n'est pas gravée dans le marbre. Il est temps de repenser une Europe forte avec une voix diplomatique conjointe, et une capacité militaire de dissuasion et de riposte crédible. Le tout sous parapluie nucléaire franco-britannique au cas où les USA nous laissent tomber comme de vieilles chaussettes. Plus facile à dire qu'à faire, et je n'en connais pas les moyens, mais je n'ai aucun doute sur le fait que la Coalition des Volontaires menée par la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne soit un premier pas - si embryonnaire soit-il -  dans la bonne direction.

    Mais j'ai lu des choses plus dérangeantes encore en réaction à cette proposition "d'accord de paix en levrette forçée". Et pas sur les rézozos sociaux que je ne fréquente plus depuis belle lurette, mais bien dans les commentaires de la presse en ligne, ou lors de discussions dans la vie réelle. Je passe sur la naïveté navrante de ceux qui disent qu'un mauvais accord de paix vaut mieux qu'une guerre. Churchill aurait bien des choses à leur répondre sur la guerre, la paix et le déshonneur. Je passe également sur l'aveuglement coupable de ceux qui prétendent que ce qui se passe en Ukraine ne nous regarde pas...alors que nous avons un conflit actif aux frontières de l'Europe, à peine à 2000 kilomètres de Paris. Et que l'Histoire nous a prouvé que lorsqu'une puissance impérialiste a recours à la force pour faire bouger les frontières, elle y prend vite goût.

    Car il y a bien pire discours. Celui de ceux qui ne se gênent pas pour blâmer la victime et ses défenseurs face à l'agresseur. La guerre serait de la responsabilité de Zelensky, et elle continuerait par sa faute et celle d'un Macron, ou d'un Keith Starmer, ou d'un Friedrich Merz, qui seraient d'horribles va-t-en-guerre. Les jean-foutre qui tiennent ce genre de discours me feraient pitié si je n'étais pas capable d'autre chose que d'un mépris glacial. 

    Car ils sont sous emprise - dans le sens psychologique du terme - comme les victimes de pervers narcissiques qui adulent leur bourreau et lui pardonnent au lieu de le blâmer. Ils font aussi penser aux gens qui condamnent la femme violée au dépens de son violeur, car elle n'aurait pas dû s'habiller sexy, et a "probablement provoqué les choses."

    D'ailleurs, la boucle est bouclée: Trump vient de pointer un doigt accusateur vers l'Ukraine, qui a rejeté son pacte capitulard. L'Ukraine n'aurait, à l'entendre, "aucune gratitude". La victime transformée en coupable, la vérité devenue mensonge. 

    Tout au long de l'Histoire humaine, on a toujours pu trouver des hommes pour les missions et les postures déshonorantes. Méfiez-vous: dans beaucoup de cas, la trahison n'est pas loin.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola

  • Les dilemmes de la blogueuse expat.

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    Je suis souvent portée sur l'introspection excessive et le coupage de cheveux en quatre, et ce billet en est peut-être un exemple. Vous en jugerez. Ma réflexion du jour est qu'il n'est pas si facile de bloguer sur des sujets politiques lorsque, comme moi, on n'habite pas en France. Pas pour des raisons de compréhension de la situation, mais bien d'éthique et d'honnêteté intellectuelle. Je vous explique.

    Oh bien sûr, je n'ai jamais rompu le contact avec la Mère Patrie. J'ai de la famille en Savoie et en région lyonnaise, ainsi que pas mal d'amis ici et là. Ma meilleure copine, expat elle aussi, est originaire du beau pays de la Loire. Je suis une amie de sa (grande) famille avec laquelle je pars souvent en vacances. On ne peut donc pas dire que je sois larguée de la réalité de mon pays, et les occasions de parler politique ne manquent pas.

    Et pourtant...une certaine déconnexion existe bel et bien. J'observe les évolutions de la situation politique confortablement installée dans mon fauteuil, ici à Bruxelles. Une crise, une réforme, une mesure fiscale ne me frapperont pas directement, et n'auront pas d'incidence sur ma vie quotidienne. Elles en auront pour ma famille et mes amis, certes, mais ma propre situation restera inchangée. Je ne ressentirai pas, dans ma chair et mon esprit, les effets des causes que j'observe.

    A contrario, en ce moment même, l'Etat belge a, lui aussi, les plus grandes difficultés à accoucher d'un budget. Et la nature de ce dernier aura probablement des conséquences dans ma vie de tous les jours. Réflexe bien naturel et humain: je m'en préoccupe beaucoup plus pour l'instant que de celui qui est discuté en ce moment à l'Assemblée Nationale!

    Ce que je veux dire, c'est que mon approche de certaines questions reste forcément en porte-à-faux avec la réalité. Sans vivre directement une situation, il est impossible d'émettre un jugement qui soit autre chose qu'une vue de l'esprit, une approximation théorique. Je me sens un peu comme une nonne à qui on demanderait d'écrire un traité sur la sexualité. Ladite nonne pourrait le faire, son intellect le permet, mais l'aspect empirique de la question serait forcément absent!

    Je ne peux décemment pas m'amener avec mes grosses godasses et expliquer à un pékin pourquoi la réforme Machin-Truc est douloureuse mais nécessaire alors que je n'en ressens pas les conséquences. Car si j'y étais confrontée, j'aurais peut-être un tout autre avis! Cela ne correspond pas à mon éthique personnelle qui est de tâcher de maintenir une certaine honnêteté intellectuelle et de ne pas me poser en Madame Je-Sais-Tout donneuse de leçons. On ne va pas dire à autrui ce qui est bon pour lui alors qu'on n'a jamais goûté soi-même au remède qu'on prétend prescrire!

    Alors oui, je peux vous parler de stratégies de communication politique, comparer des méthodes de gouvernance, chipoter sur un point de la Constitution, débattre sur l'issue d'un procès médiatisé, comparer une idéologie à une autre ou tâcher d'analyser pourquoi une personnalité politique plaît à mes compatriotes alors que telle autre leur file des boutons. Mais entrer dans l'analyse de situations qui nécessitent, pour être totalement comprises, le réglage fin de l'expérience personnelle...j'estime qui faut marcher sur des oeufs afin de ne pas courir le risque de passer pour une sotte en train de jacasser sur des sujets dont elle n'appréhende que la théorie. 

    Cela ne veut pas dire que je ne doive pas avoir d'opinion, ou que je m'interdise totalement de l'exprimer. Mais j'entrerai dans ce genre de discussions - pour peu que j'y entre - avec l'avertissement d'usage suivant: "je garde à l'esprit que mon opinion reste assez théorique, mais je pense que...bla bla bla". La nuance est subtile, mais importante.

    Bien sûr, le fait d'être un peu en retrait offre aussi des avantages, comme de bénéficier du recul, de la hauteur de vue qu'il est impossible d'avoir en étant au coeur de la mêlée. Mais il faut faire attention. Tant qu'une opinion n'a pas été testée au banc d'essai du réel, elle n'est que théorie. Se baser sur cette supposition est l'essence même de la pensée scientifique.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola.

     

  • Les petites phrases du Général de Gaulle.

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    "Les Français sont des veaux! Ils n'ont pas encore compris qu'ils ont perdu la guerre. Ils méritent ce qui va leur arriver".

    C'est avec cette phrase très dure, rapportée par André Malraux après l'Appel du 18 juin 1940, que Charles de Gaulle inaugurait une série de "petites phrases" prononcées tout au long de sa carrière. L'analogie avec les veaux marquait sa tristesse et son exaspération face à une partie de la population française qui allait suivre de manière résignée et apathique la voie de la collaboration et donc de la trahison.

    Mais nous ne sommes pas ici pour un cours d'Histoire. Je voulais partager avec vous l'agacement que je ressens à chaque fois qu'un quidam sort des phrases du type: de Gaulle ne se serait jamais comporté ainsi. de Gaulle n'aurait jamais dit çà. Le pauvre Général doit se retourner dans sa tombe à chacune de ces tentatives de psychotage provenant de gens qui, assurément, savent mieux que lui ce qu'il penserait, ferait et dirait dans les circonstances présentes.

    Dans ce billet, j'aimerais me pencher sur certaines de ses "petites phrases", et imaginer la réaction qu'elles susciteraient dans un monde de la communication régie par les rézozos sociaux et la quête permanente de la phrase polémique. Je n'ai pas succombé aux sirènes de l'IA pour ce faire. Je me suis basée sur 3 bouquins que je cite en fin de billet et où je savais trouver quelques anecdotes croustillantes.

    Nous avons donc commencé avec "les Français sont des veaux". Continuons:

    "Les français sont des enfants gâtés. Ils râlent sans cesse, mais ne veulent rien changer." Phrase reportée par Alain Peyrefitte dans un contexte de grogne sociale en 1966-1967. Cette phrase a un petit parfum de "Gaulois réfractaires", non?

    Il y a aussi le fameux "La réforme, oui. La chienlit, non. Et la chienlit, ce n'est pas moi!" lors des évènements de mai 1968. Et de surenchérir:

    "C'est purement négatif de toujours remettre tout en cause. C'est, en somme, la marque des faibles et des incapables".

    Ou encore: "La mollesse française est d'une extrême épaisseur. Mais même en France, elle n'est pas l'avenir, qui est aux forts."

    Un petit peu de "vivre ensemble"? Voilà: "Je vais vous dire ce que c'est que l'Afrique: c'est noir et çà grouille." Ouille! Le bruit et l'odeur à côté, c'est de la petite bière.

    Imaginez un peu le tollé que provoquerait ce genre de petites phrases si les médias et les réseaux actuels s'en emparaient. Elles seraient immédiatement considérées comme du mépris et du paternalisme outrancier vis-à-vis d'une partie de la population. Quant à la petite touche sur l'Afrique, incidents diplomatiques en vue.

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    Et qu'en est-il de ces autres saillies au sujet de la conception de la gouvernance, si elles étaient transposées à notre époque où le mot "dictateur" est si vite dégainé? Allons-y pour un petit florilège:

    "Les partis, c'est le cancer de la France". Carrément!

    "Il ne peut y avoir qu'une seule autorité: la mienne."

    Nous voyons à quel point de Gaulle considérait le Président comme une figure d'autorité solitaire, qui n'exerce pas le Pouvoir mais est le Pouvoir incarné. Sa parole est rare et très verticale, en contraste flagrant avec le bruit de fond constant des réseaux sociaux et des media modernes, où la parole est continue, égalitaire mais diluée. Les politiciens modernes, Président en tête, usent et abusent de cette stratégie de l'exposition médiatique quasi constante. Qui écoute encore vraiment ce brouhaha omniprésent?

    Tout çà pour vous dire que beaucoup de gens ressortent le Général du placard au moindre mécontentement, en ignorant involontairement ou volontairement la sévérité avec laquelle il s'exprimait souvent. Je ne manque jamais de donner à ces nostalgiques une petite piqûre de rappel dès que j'entends ce type de raisonnement. Car oui, en son temps de Gaulle n'était pas encore tout à fait la figure quasi mythique qu'il est devenu. Certains le disaient arrogant, autoritaire et paternaliste, et voyaient en lui un dictateur potentiel. N'avait-il pas activé l'Article 16 de la Constitution lors du putsch des Généraux en 1961 en Algérie?

    Vous me rétorquerez sans doute - non sans logique - qu'il est impossible de comparer un chef de guerre et chef d'Etat ayant gouverné il y a plus d'un demi-siècle à l'offre politique actuelle. Et ce n'est pas faux. Mais là n'est pas mon propos. Je tiens simplement à souligner que le Général a bel et bien atteint le statut d'icône nationale idéalisée, mais que lorsqu'il avait quelque chose à dire il ne mâchait pas ses mots, et pouvait être extrêmement tranchant.

    Et qu'à notre époque, où il n'y a plus moyen d'être un peu cash en ligne sans que quelqu'un ne se sente rapidement offensé et crie à la micro-agression, notre bon Général aurait probablement suscité quelques psychodrames suite à ses petites phrases bien senties.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola.

     

    Ouvrages consultés:

    Les Chènes qu'on abat - André Malraux, 1971

    De Gaulle, mon père - Philippe de Gaulle, 

    C'était de Gaulle - Alain Peyrefitte (1994-2000)

     

  • Donjons, dragons, prison.

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    Or donc, c'est fait: ce soir, Nicolas Sarkozy dormira en prison. 

    J'avais écrit un billet quand il a pris cinq ans assortis d'exécution provisoire, et j'avais abondamment commenté cette décision de justice sur divers blogs. Oui, je crois que quand on traîne toute une batterie de casseroles, il y a un moment où on finit par payer l'addition. Les magouilles c'est comme la Lune dans le ciel, parfois elle est cachée mais elle finit toujours par se voir. Non, je ne crois toujours pas au "complot des juges rouges". Et le proverbe disait vrai: le pouvoir corrompt, et le pouvoir suprême est un risque encore plus grand de corruption. Le jour de l'incarcération de Sarkozy devrait donc me laisser relativement indifférente vu que les choses étaient programmées depuis un moment.

    Pourquoi alors suis-je d'humeur aussi massacrante?

    Bien sûr, aujourd'hui n'est pas un jour de gloire pour ce qui est de l'image donnée par notre classe politique: un ancien chef de l'Etat derrière les barreaux comme le dirigeant déchu d'une vulgaire république bananière, il n'y a pas de quoi se réjouir. Mais je me rends compte que mon malaise est plus insidieux encore.

    J'ai été sarkozyste en 2007. Je ne l'étais plus en 2012. Petit à petit et au cours des années, j'ai adopté une démarche très circonspecte vis-à-vis des hommes politiques et des idéologies. Je préfère l'examen réfléchi des actions sur le terrain aux postures de partisans rangés derrière le chef avec le doigt sur la couture du pantalon. Je n'aime plus trop les adjectifs et qualificatifs en -iste et -isme, qui me paraissent assez réducteurs, bien que j'en use parfois comme facilité de langage.

    Sarkozy, donc. Au delà de ses idées, réalisations, revirements ou foirages, il a toujours eu une personnalité que les gens adoraient ou détestaient, mais qui laissait rarement indifférent. Il y a un côté émotif oriental chez lui, et une propension marquée à la transgression et à la disruption. Il porte en lui un peu de ce que les rôlistes de l'univers Donjons et Dragons identifient comme l'Etoile du Chaos. Dans cet univers, le Chaos n'est pas nécessairement destruction et bordel désorganisé, il peut également être promesse de renouveau et dépassement des anciennes croyances. C'est une arme à double tranchant, puissante mais souvent dangereuse.

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    Et c'est ici que ce billet cesse d'être politique pour entrer à pieds joints dans la sociologie de comptoir assaisonné de culture geek. Dans la vie réelle, je repère les individus dont la pensée est en alignement chaotique de façon immédiate et viscérale. La résonance est aussi naturelle que celle de l'aiguille d'une boussole qui s'aligne sur le Nord magnétique. Oh rassurez-vous, rien de pathologique n'en découle. Il n'y a pas de tueurs en série, de bandits de grand chemin comme Bonnie et Clyde, ou de révolutionnaires aux mains sanglantes dans mon petit Panthéon personnel (et Panthéon est un grand mot). Je ne crée pas de liens affectifs malsains avec de mauvaises fréquentations, ne souffre d'aucune assuétude (à part de discuter politique) et n'ai jamais eu de problèmes avec la justice. D'ailleurs, je recherche souvent parmi mes connaissances des gens stables et cartésiens qui contrebalanceront mes propres fulgurances, mon propre chaos. 

    Est-il donc vraiment surprenant qu'une personnalité comme Sarkozy ait attiré mon attention, par delà même de son positionnement politique? Bien sûr que non. Est-ce une des raisons pour les quelles sa chute m'agace? Y a-t-il encore un peu de sa personnalité chaotique qui ne me laisse pas indifférente? Il y a probablement de çà. Fin du capillotractage sociologique.

    De plus, il y a un peu de mon ancien moi que j'enterre en tournant pour de bon la page Sarkozy. L'époque où j'étais une idéaliste incapable de compromis, carrée, tranchante, d'une maturité politique à peine adolescente malgré mon âge adulte. Je relis parfois certains vieux billets de mon ancien blog de 2007...ah que j'étais naïve alors! Les portes de la prison de la Santé se referment avec un clic définitif sur ma naïveté d'antan. Je dois bien admettre que j'en suis parfois nostalgique. C'est sans doute la raison principale pour laquelle je suis de mauvais poil aujourd'hui.

    Cela veut-il dire que j'aurais gardé quelque part un petit peu d'affect pour cette vieille canaille de Sarko? Peut-être bien! Ce n'est pas rationnel, mais je suppose que c'est humain.

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola.

  • Les six pistoleros LR.

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    Or donc, le nouveau gouvernement Lecornu est sur pied. Profils techniques, jeunes visages, avec un poil de recyclage quand même...çà peut marcher. Je crois que demain, lors de sa déclaration de politique générale, Lecornu mettra provisoirement la réforme des retraites au frigo, afin d'éviter le vent des boulets que le PS menace de tirer s'il ne le fait pas. On sait déjà que LFI et le RN vont canonner à pleine bordée. Aux grincheux qui affirmeront que lâcher sur la réforme des retraites c'est jeter à la poubelle une mesure phare de Macron, je répondrai que pour l'instant, les priorités sont de déposer un budget et de retrouver un peu de stabilité institutionnelle. Tout bien réfléchi, rediscuter sérieusement de ce truc torché à la va-vite n'est sans doute pas une mauvaise idée. A l'heure où le navire France prend l'eau par tous ses sabords, la priorité c'est d'arrêter les voies d'eau, pas de se préoccuper du menu de la cantine. Un peu d'agilité intellectuelle et d'adaptation en situation de crise, s'il vous plaît!

    Mais le sujet que je veux développer aujourd'hui est l'entrée au gouvernement de six ministres LR, brisant allègrement la discipline de leur parti et les consignes de Bruno Retailleau qui étaient de ne pas participer au gouvernement Lecornu 2. Eh bien, pas de railleries ni de phrases cinglantes de ma part ce coup-ci. Vous me direz mais enfin, c'est une trahison, une rupture de la discipline du parti, ces opportunistes ont vendu leur âme pour une assiette de soupe et un plat de lentilles! Honteux!

    Seulement voilà, l'auberge macroniste vers laquelle ils se dirigent, c'est pas La Tour d'Argent ou Le Pied de Cochon. Les murs sont fissurés et question réputation, le taulier a perdu ses étoiles Michelin vis-à-vis de l'opinion depuis un bon moment déjà. Quel serait l'intérêt de s'embarquer dans cette galère? J'ose espérer que ces six ministres ont agi selon leur conscience dans l'intérêt de la Nation, en mettant leurs doutes, critiques et rancoeurs éventuelles en veilleuse. Parce qu'ils pensent qu'ils seront plus utiles au sein du gouvernement qu'en dehors, même si leur parti lui a promis de soutenir ce dernier. Acteurs agissants plutôt que béquilles passives. Les cyniques qui voient toujours le verre à moitié vide et des intentions égoïstes partout me diront que je suis bien naïve. Peut-être, mais je persiste à croire que la démarche de ces pistoleros dissidents est basée sur une volonté d'agir pour le bien commun.

    Si Bruno Retailleau veut montrer qu'il est maître chez lui, il ne pouvait pas faire autrement que d'exclure ces six personnes de son parti, sans quoi il aurait donné l'image d'un chef faible, qui ne respecte pas ses propres consignes. Rien à dire là-dessus, il n'avait guère le choix.

    Ce que j'aurais fait à la place de cette "bande des six"? Obéir aux consignes du parti ou à ma propre boussole interne? Je m'en tiens à mon propre conseil pour ce qui est d'agir de la manière que j'estime juste. Je ne serai jamais à l'aise dans la structure d'un parti ni avec le fait de m'aligner avec la ligne de ce dernier si cela veut dire ne pas être alignée avec ma propre conscience. Et qu'en est-il des valeurs idéologiques fondamentales, me direz-vous? C'est très simple, et je vais citer le général Clausewitz: nul plan de bataille ne résiste à l'exposition avec le réel. En situation de crise, il faut savoir s'adapter et regrouper ses ressources pour faire face à la situation le mieux possible.

    Oui, je serais entrée dans ce gouvernement. Pas pour le frisson illusoire du pouvoir ou les avantages en nature, mais bien parce que je pense que, si j'ai les compétences nécessaires, il est préférable d'agir du dedans plutôt que de se contenter de rester à l'extérieur de l'arène. Je ne dis pas que cette dernière position n'est pas un choix valide, je dis simplement que ce n'est pas le mien.

    Et, pour conclure, une dernière citation, de Charles Darwin cette fois: lors de l'évolution, ce ne sont ni les plus forts, ni les plus intelligents qui survivent. Ce sont ceux qui s'adaptent. A méditer!

     

    A la revoyure,

    Juliette Evola